Sujet et corrigé d'une dissertation (terminales technologiques) : A-t-on raison de croire ?

Publié le par Bégnana

Les Anciens croyaient que le Soleil, la Lune et même le sommeil étaient des dieux capables d’influer sur leur vie. Certains de nos jours croient qu’aucun homme n’a marché sur la lune. Au vu de ces exemples, on peut se poser la question : a-t-on raison de croire ?

À première vue il semble que non puisque croire, c’est affirmer comme vrai ce dont on n’a pas de preuve, et avoir raison, c’est précisément avoir une preuve de ce qu’on avance.

Néanmoins, il paraît difficile de condamner celui qui croit qu’il vit sur Terre et non sur une autre planète parce qu’il ne peut pas le prouver.

On peut donc se demander s’il y a des conditions qui font qu’on a raison de croire.

On n’a pas raison de croire s’il faut toujours prouver ou suspendre son jugement. Par contre, on a raison de croire au sens de faire confiance lorsque la raison est impuissante. Enfin, s’il faut des principes de la connaissance, on a raison d’y croire tant qu’ils ne se heurtent pas à ce qu’on sait par ailleurs.

 

 

Croire, c’est non seulement tenir quelque chose pour vrai sans preuve, c’est-à-dire sans raison valable, mais c’est aussi s’appuyer sur de mauvaises raisons. En effet, si comme Alain, dans les Définitions (1953 posthume), on examine les degrés de la croyance, on peut voir qu’aucun n’est valable. Croire parce qu’on désire ou qu’on a peur. Que d’erreurs ! Que de drames en résultent ! Croire par imitation, voire parce que c’est la tradition, ne garantit pas non plus de l’erreur. Croire comme tout le monde, c’est partager l’erreur commune. Par exemple, croire que la Terre est immobile. Enfin, croire ce que les savants prouvent est certes louable, mais ne vaut-il pas mieux prouver. Comment faire pourtant lorsqu’on ne peut pas prouver ?

Finalement, c’est en refusant de donner son assentiment, en restant dans le doute, qu’on peut ne pas croire et avec raison. C’est qu’en effet, je puis toujours agir en choisissant une hypothèse ou supposition. Le soldat au combat, le sportif se décide sans aucune certitude. Et d’ailleurs, c’est en essayant, donc sans croire, qu’il est possible d’inventer comme le font les techniciens ou ingénieurs. Quant aux savants, ils émettent d’abord des hypothèses et ne prétendent avoir des connaissances que lorsqu’ils ont des preuves qui leur paraissent suffisantes.

Cependant, refuser toute croyance revient à se reposer sur une croyance d’autant plus impérative, la croyance en la raison. Dès lors, est-ce la seule ou bien a-t-on raison de croire dans certains cas et lesquels ?

 

On peut avoir des raisons de croire qui ne nous donnent pas raison de croire. Par exemple, les Anciens croyaient que le Soleil est un Dieu. Aussi ont-ils fait un procès à Anaxagore (v° av. J.-C.) pour avoir affirmé qu’il s’agissait d’une boule de feu. Leurs raisons en étaient leur foi ou plutôt l’interprétation restrictive de leur foi. C’est que celle-ci est une modalité de la croyance particulière. Elle s’appuie sur le sentiment et réside dans la confiance en une parole. Soit c’est la parole d’un Dieu. Et il faut avoir la foi pour y croire car on peut toujours lorsqu’on entend une voix ou un témoignage, les récuser. Ainsi, la foi repose sur des raisons qui ne sont pas celles de la raison. Y a-t-il donc de bonnes raison de croire en ce sens ?

Lorsqu’on aime quelqu’un, on croit en lui. Et l’amour est à la fois la raison de croire en l’autre et une bonne raison. Car, dans l’hypothèse où on ne croirait pas en l’autre, l’amour serait détruit. Ainsi des parents qui aiment leurs enfants ont de bonnes raisons de croire en lui sans quoi ils les transformeraient en ennemis. Il en va de même de la foi religieuse dans la mesure où elle demeure une affaire privée. Si elle se transforme en fanatisme dont la raison fondamentale est le serment à soi comme le dit Alain à l’article « Préjugé » dans ses Définitions, c’est-à-dire la volonté de conserver la vérité, alors une bonne raison de croire se transforme en son contraire. C’est pourquoi la raison elle-même selon Pascal dans les Pensées, doit s’appuyer sur des croyances, celles du cœur, sans quoi, voulant toujours tout démontrer, elle tombe dans le pyrrhonisme, c’est-à-dire dans le rejet de tout. On a donc raison de croire lorsqu’il s’agit des principes nécessaires pour que la raison elle-même soit possible et donc lorsque nous avons le sentiment de la vérité.

Néanmoins, si la foi est nécessaire dans les relations humaines, à supposer même que l’homme a besoin de croire, n’est-ce pas faire tort à la raison comme faculté que d’accorder une confiance aveugle en certaines croyances ? Ne faut-il pas pour avoir de bonnes raisons de croire limiter en quelque sorte les croyances ? Et alors comment ?

 

C’est que pour avoir raison de croire exige que l’on satisfasse la raison. Autrement dit, opposer comme Pascal les raisons du cœur à la raison, comme lorsqu’il déclare dans ses Pensées (Lafuma, 423) que « Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point » c’est introduire une contradiction en l’homme. Le partage entre le cœur et la raison ne peut pas se faire de telle sorte que la raison serait entièrement soumise aux principes découverts par le cœur. Si la raison ne peut prétendre juger de tout, elle peut tout examiner comme le préconise Diderot dans son article « Croire » de l’Encyclopédie. Comment est-ce possible ?

Lorsqu’on admet un principe pour la recherche, lorsqu’on a foi en quelqu’un, voire lorsqu’on adhère à une doctrine religieuse, il peut s’avérer que les conséquences se révèlent en contradiction avec nos croyances. Dès lors, il paraît nécessaire de ne pas croire. Aussi n’a-t-on raison de croire que si et seulement si la croyance, quelle qu’elle soit, ne contredit pas la raison. Ainsi pour des raisons pratiques croyons-nous souvent les autres, sauf si ce qu’ils nous racontent paraît cousu de fil blanc. Mais on ne croit plus celui qui ment systématiquement. Ainsi, n’a-t-on raison de croire en ce qui échappe à toute preuve ou démonstration, ce qui n’est contredit par aucun fait par ailleurs connu. On a raison de croire être sur une planète en mouvement mais non à l’idée qu’aucun homme n’a marché sur la Lune.

 

 

Somme toute, le problème était de savoir s’il y a des conditions qui nous donnent raison de croire. On a vu que nous n’avions pas de raison de croire en général. Par contre, la raison étant limitée, s’ouvre une condition pour avoir la foi. Il n’en reste pas moins vrai qu’il apparaît que nous n’avons raison de croire que tant que nous n’avons pas de bonnes raisons de ne pas croire de sorte que même la foi ne peut être acceptée aveuglément.

 

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T
JE TE VOIE TS2 JJR
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T
Dédicasse a la TES3 du lycée JJR y'a les reponses de la dissert qu'on doit faire ici
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B
Inutile de recopier un corrigé que le professeur trouvera et qui a été fait pour une classe. Il vaut mieux les consulter après avoir fait le sujet, seul.